Comprendre comment la perte de lymphocytes favorise l’épuisement lymphocytaire

Un nouveau travail de recherche mené sous la direction de Pauline Soulas-Sprauel, à la tête du groupe « Homéostasie lymphocytaire & auto-immunité » dans l’unité Inserm 1109 / Université de Strasbourg, révèle que la lymphopénie — une réduction drastique du nombre de lymphocytes T — est un moteur majeur de l’épuisement des cellules T. Cette découverte, basée sur un modèle murin porteur d’une mutation gain de fonction du gène STING, ouvre de nouvelles pistes pour mieux comprendre et traiter les immunodéficiences sévères.

Dans cet article publié dans EMBO Molecular Medicine, les chercheurs du groupe « Homéostasie lymphocytaire & auto-immunité »  dans l’unité Inserm 1109 / Université de Strasbourg dirigé par Pauline Soulas-Sprauel ont étudié des souris présentant une mutation activatrice (gain de fonction/gain of function GOF) de STING (V154M), connue pour provoquer une maladie inflammatoire autoinflammatoire appelée SAVI. Ces souris développent une lymphopénie profonde, en partie liée à un développement thymique altéré. L'équipe a mis en évidence un phénotype de cellules T ayant un caractère profondément épuisé (PubMed, Embo Press). L’épuisement des lymphocytes T se caractérise notamment par une perte de leur fonction et se retrouve dans des situations d’infections virales chroniques ou de cancers.

Sur le plan mécanistique, en situation de lymphopénie, les cellules T naïves subissent une stimulation exacerbée du récepteur IL-7 et du TCR, en particulier via la voie NFAT, un facteur central dans l’épuisement des cellules T. Toutefois, lorsqu’on greffe des cellules souches hématopoïétiques STING gain de fonction (provenant de la moelle osseuse) en présence d’une moelle osseuse de type sauvage (non lymphopénique), l’épuisement cellulaire est évité, prouvant que c’est bien la lymphopénie – plus que l’effet direct de la mutation STING – qui en est la cause principale.

De plus, ce phénomène d’épuisement induit par lymphopénie n’est pas spécifique à la mutation STING : il est également observé dans d’autres modèles de souris lymphopéniques, suggérant un mécanisme général applicable à diverses immunodéficiences sévères.

Ce résultat a des implications thérapeutiques importantes, car il cible la restauration de la lymphopénie comme un levier potentiel pour prévenir ou atténuer l’épuisement des cellules T dans certaines maladies immunitaires graves.

 

Source : Freytag D, Giorgiutti S, Hopsomer G, Wadier N, Depauw S, Mertz P, Augé F, Carapito R, Couillin I, Korganow AS, Pala F, Bosticardo M, Notarangelo LD, Rieux-Laucat F, Riteau N, Kirstetter P, Soulas-Sprauel P. Lymphopenia drives T cell exhaustion in immunodeficient STING gain-of-function mice. EMBO Mol Med. 2025 Sep;17(9):2438-2461.
DOI: 10.1038/s44321-025-00292-6

Contact : Pauline Soulas-Sprauel, soulaspa[at]unistra.fr